Les maisons sont toujours là,
De part et d’autre,
Frileuses, qui se serrent
Dans la rue de mon enfance,
Depuis l’église austère
Jusqu’à la rue de Niedervisse ;
Je connais bien leur vie.
Peuplées, dépeuplées,
Certaines un peu décrépies
Qui n’hébergeaient plus, parfois,
Qu’une femme en noir :
Intimes refuges, ultimes matrices
Avant l’infâme de la tombe.
Peuplées, dépeuplées
Et puis, débarrassées, transformées,
Façades remaniées, recrépies,
Portes de grange en portes de garage
Et repeuplées ainsi
De jeunes gens et d’Allemands
Dedans ces univers volages
Où les hôtes viennent et vont.
Les maisons sont toujours là,
Parcelles de poésie vivaces
Dans ma rue d’autrefois,
Mais les enfants qui, comme moi,
Tenaient pour vrai les enchantements,
Les fables et les fantômes,
Ces enfants là, n’y jouent plus.