Avril

Au sortir de l’hiver, alors que le printemps
Pressé de s’installer s’était montré précoce,
La pluie inaugura le changement de temps
Et le vent rugissant se déchaîna, féroce. 

Mais dès le premier jour, ce mois capricieux
Présenta son aspect le plus irrésistible :
Son amour de la farce et du facétieux
Dans l’accomplissement d’un rite irréductible. 

Les averses de mars ont déclaré forfait ;
Le soleil courageux perce à l’aube la brume
Et le chant des oiseaux dans un accord parfait
S’élève dans les airs, léger comme une plume. 

Mais il ne faudra pas se découvrir d’un fil
Avant que ne s’en aille, avec la bise rude,
La dernière gelée, ô funeste péril !
Pour les arbres en fleurs malgré l’incertitude. 

Paisible

Un silence apaise jusqu’à l’âme d’une agitation qui ne pèse plus, un répit abandonné à la tranquillité s’attache à la réalité continûment d’un repos…

Ne pas déranger sa paix.

Bruges

Lentement les canaux, épais et monotones,
Traînent leur encre lourde où s’enlise le soir.
L’eau morne se balance et le passant s’étonne
D’une ultime lueur au fond de ce miroir.
Une timide lune, languide, s’abandonne
            Contre les quais tout noirs. 

            Un vieux marin marmonne.
            C’est Bruges la noire. 

Des rideaux de dentelle, aux confins de la bruine,
Habillent de pâles rêves un matin de dimanche.
Au beffroi carillonnent trois notes cristallines.
Une péniche obèse, en balançant ses hanches,
Salue quelques colverts, tandis que s’achemine
            La fin d’une nuit blanche. 

            Un vieux pont s’embéguine.
            C’est Bruges la blanche. 

Les ailes des moulins gribouillent de la brume
Sur les clochers frileux qui coiffent les églises.
Une calèche passe, un réverbère allume
Une ombre de cheval sur les pavés qui luisent.
Déjà le crépuscule enfile son costume
            Au coin des rues si grises. 

            Un vieux cocher s’enrhume.
            C’est Bruges la grise. 

Des rideaux de dentelle tracent dans un miroir
Une ombre de cheval où s’enlise le soir… 

Les ailes des moulins, qui balancent des hanches,
Habillent d’une calèche un matin de dimanche… 

Lentement les canaux, où flottent les églises,
Gribouillent de la brume sur les pavés qui luisent. 

Riche et pauvre

          << Parfois pour mieux se protéger,
  la vérité a besoin de beaucoup de mensonges. >> 

Riche à donner la mort, pauvre à donner la vie,
Qui peut suivre demain cet infâme bretteur ?
Plonger dans le combat auquel il nous convie ?
Se croire aux yeux du monde un guerrier salvateur ? 

Prêcher dans le désert, plus rien ne l’en dévie :
Riche à donner la mort, pauvre à donner la vie,
Moderne templier, quel étrange pasteur
Pense offrir à l’Irak un futur prometteur ? 

Sa trompeuse vertu demeure inassouvie :
Sous prétexte d’exclure un cruel dictateur
Riche à donner la mort, pauvre à donner la vie,
Il œuvre aux vœux d’un clan : signe révélateur. 

Englué dans la haine, un mal que nul n’envie,
Préparant au grand jour un flot dévastateur,
Le Texan se transforme en horrible vecteur
Riche à donner la mort, pauvre à donner la vie. 

Une femme

Elle rêve, lascive, ardente originale,
A cette phase ultime, intangible moment,
De sentir tout son corps frémir intensément,
Béni d’un flux d’amour, l’offrande séminale. 

Au jardin de son cœur, seul parfum qu’elle inhale,
Le bonheur désiré vit sous un ciel clément ;
Ce fruit pur de sa chair annonce clairement
Son besoin d’assouvir une faim matinale. 

- Tel un hymne subtil, l’appel du nourrisson
Dans l’âme maternelle inspire un doux frisson ! -
Elle œuvre au divin philtre en la source ivoirine, 

Par une longue étreinte où l’enfant se complaît
Le rassure, s’assoit, tend son ample poitrine
Et donne à ce bel ange un sein gonflé de lait. 

Café de l’usine

Dans la grisaille du petit matin,
Les alambics géants
Distillent des souvenirs frelatés. 

Accoudé au comptoir,
Il voudrait oublier le travail incestueux
Au ventre de la Terre,
Les hommes de la nuit, exténués,
Maquillés de noires douleurs.
Les boyaux de la mine se tordent
Au fond de son verre vide. 

Près du café de l’usine,
Dans la rouille du petit matin,
Titube un chevalement désarticulé. 

L’indicible !

Petite fleur on t’a flétrie,
L’homme a osé !
Petite fille on t’a souillée,
Blessée à vie. 

Tu n’étais que bouton de rose,
Une promesse,
Il a piétiné ta jeunesse
A peine éclose. 

Tu étais une enfant, riante d’insouciance,
Tu avais du soleil, l’éclat et l’insolence,
Tu étais joie, et jeux, tu étais l’innocence
Qui donne la beauté aux années de l’enfance. 

Il a trahi ton insouciance,
Changeant ton rire en pleurs et peur.
Il a fait de ton innocence
Un jouet de vice et d’horreur. 

L’homme était là pour te chérir,
Et ses bras, pour te protéger.
Comment feras-tu pour guérir ?
Pourrais-tu un jour oublier ? 

Oublier
La blessure
Qui torture,
La souillure,
Forfaiture ! 

Oublier ? 

Petite fleur, petite fille
La vie sourira de nouveau.
Pour que la joie, en tes yeux, brille,
Un jour, un jour il fera beau ! 

Un autre homme, une autre caresse
Te feront oublier la peur.
Alors, l’obsédante détresse,
Enfin, fera place au bonheur ! 

« ORÉADE » singulière princesse (ou le bonheur d’être un papi)

Le ciel était bien bas, de gros nuages noirs,
Couleur de cafard et d’ennui,
Encombraient la vallée et, tel un déversoir,
Allaient me noyer sous leur pluie. 

Las, reverrai-je un jour les sommets enneigés
Tout éclaboussés de lumière ?
A mon insu, leur souvenir s’en est allé.
Dieu ! Que mémoire est éphémère ! 

Dans un songe, un matin, mais rêvais-je ? Qui sait ?
Le sourire, comme un cadeau,
D’Oréade, princesse ou nymphe des sommets,
M’était offert tel un joyau. 

Il est mainte lumière au ciel de mes matins,
Jalonnant une longue route.
Parfois, l’étoile luit malgré que soit éteint,
Depuis longtemps, son feu, sans doute. 

Moi, j’aime voir briller, dans le ciel de mes nuits,
Les étoiles de mes bonheurs,
Dès lors, l’ombre s’éclaire et, quand l’aurore luit,
L’espérance entre en ma demeure. 

Et, lorsqu’une princesse, une nymphe, une étoile
S’attarde sur mon chemin
Et requiert mon appui pour parfaire sa toile,
Je sais qu’il fera beau demain ! 

Je me souviens

Je me souviens de ces matins aux couleurs crépuscule, des jours
gris-bleus aux couleurs de la brume, des roses de l’hiver, ô combien
éphémères . 


J’ai vu les pluies d’été tombées et mes amours restés à quai.
Je me souviens de ces désirs inassouvis à tout jamais enfouis. 


Je me rappelle la légère brise du vent emportant avec elle mes tourments
sous un ciel bleu azur j’ai fini par cicatriser mes blessures. 


Désormais, je peux regarder la nuit qui tombe sans ombre aucune.

Froide nuit

Pas un bruit ne rompt dans le camp qui dort
Le silence épais, amant de la brume
Qui glisse et étreint de ses membres morts
Le village que contemple la lune.

Un nuage gris fuyant au lointain
Dessine un instant son ombre éthérée
Sur les côteaux bleus laissés en regain
Puis c’est à nouveau la nuit ouatée.

La neige durcie par des nuits de froid
Apporte elle aussi son décor immense
Au calme grandiose où pas une voix
Ne brise, n’affaiblit cette paix intense.

Seul l’écho apporte ses bruits incertains
Les sons inouïs, murmures infimes
Qui viennent mourir d’un règne lointain
Faisant bruisser l’air de leurs notes fines. 

L’automne

L’automne est arrivé soudain sans crier gare,
Il a laissé l’été dans un grand tourbillon,
Recouvert la cité d’une écharpe bizarre,
Et pâli le soleil dès son premier rayon.

Il a jauni les feuilles et noirci le ciel lourd,
Et l’aube qui se lève est chargée de tristesse,
Car elle sait que rôde un janvier alentour,
D’un automne morne et triste, dépourvu de noblesse.

Le brouillard s’est dissout, laissant place à l’ondée
Qui semble tant noyer et le ciel et la terre,
Mais l’été se refuse à plonger dans l’éternité,
Et juillet ne veut pas que si vite on l’enterre.

Il vibre encore au fond de mon âme fidèle,
Ressuscité sans cesse par d’autres souvenirs,
Qui le rendent à mon coeur pour toujours éternel,
Son règne ne s’éteindra qu’avec mes jours finis.

Tu peux donc arriver, pauvre et sombre automne,
Pour effacer les traces d’une si belle saison,
Car ta flamme glacée ne réchauffe personne,
Celle du souvenir te fera entendre raison.

Nu

nu.jpg
Dépouillé de tout artifice,
Tel un arbre en hiver,
Voir encore sans malice,
Aujourd’hui comme hier. 

Enlever toutes les écorces,
Armures et fausses forces,
Arrimé sur les branches. 

Encombré de tous les mots,
Jamais vains, inutiles ou sots,
N’en dire plus qu’un seul. 

Ne plus changer de veste,
Plus un mot, plus un geste,
Trouver l’habit qui reste. 

Noyé de toutes les pensées,
Rencontrer les plus épurées,
N’en garder plus qu’une seule. 

Dépouillé de tout artifice,
Dans un autre univers,
Entrevoir avec délice,
La médaille et son revers.

Jour de chance

               Sentir et revoir les errances,
                  Issues du fond de l’enfance. 

Oser voir avec bienveillance,
N’y voir qu’une si belle instance. 

         Cueillir la rose de confiance,
            Habillée de pure préséance
                Accepter une nouvelle ambiance,
                     Nourrie de tant d’insistance.
                         Tomber puis recevoir la quittance,
                              A l’aube d’un autre jour de chance,
                                   Intérioriser toute l’importance,
                                      Tandis que s’inverse la tendance. 

      Ouvrir un monde sans méfiance,
         Uniquement la vie, la chance,
             Immense cadeau tel une romance… 

                                      A celui dont le cœur balance, 

                      Léger et pur, ivre d’ignorance,
                   Allégé de tant de souffrance, 

                                                             Voir encore et encore
                                                                Immobile et subtile, la rose,
                                                                  Eclose d’un nouveau jour

 

Amour couchant

J’avais rêvé de deux épaules rapprochées,
            complices sur un banc,
                        face au soleil mourant,
et de mes doigts à fleur d’un visage s’offrant
            à la caresse d’une lumière effilochée. 

                        J’avais rêvé de confidences murmurées
                                   avec pour seul témoin
                                               l’eau calme d’un étang,
                        et des quelques instants que l’espoir vole au temps
                                   quand des peaux enfiévrées osent s’abandonner. 

Mais le rêve est passé…
            et refermée la porte…
                        porte étroite claquant au vent des aubes mortes. 

            Ô, songes qui avortent avant de voir l’amour ! 

Ce soir le banc est vide
            et le soleil se couche… 

                                   Noire sera la nuit…et amère ma bouche
                                               quand l’incendie du ciel achèvera le jour. 

 

Bernard Appel

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J’ai commencé à écrire des poèmes pour que demain ne soit plus un tourment labourant plexus et ventre, pour que les brumes, enfin, aient la douceur d’un humble baiser sur mes tempes, pour ne plus avoir mal…que des estafilades de la ronce sur les chemins libres de l’enfance…
Depuis, de poème en poème, je me sens devenir guetteur de lisières, funambule qui débusque les mots, en équilibre toujours précaire sur les étroits et sinueux chemins qui, peut-être, mènent vers la tendresse, cette planète douce et mélancolique où l’ombre finit par faire un peu de place à la lumière.
Je ne suis d’aucune école, d’aucune chapelle, je me sens traversé par toutes les influences sans en adorer  ni en répudier aucune.Mon style poétique, si tant est que j’en ai un, s’est forgé au fur et à mesure des années et les seules contraintes que je me donne sont celles que me dicte mon oreille, celles que m’impose mon exigence de sens, de lisibilité, d’authenticité, de musicalité. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire cela ne ressemble en rien à de la facilité…
Oui j’aime  la musique des mots, mais j’aime aussi leur chair autant que leur sens  et leurs couleurs.J’aime la poésie dite et vivante, sortie de la poussière des bibliothèques. J’évite la poésie monocorde et monotone. Je veux qu’elle soit cri , plainte ou murmure, action de grâce, battement du coeur, expression charnelle, souffle, halètement , vie… » 
 A ce jour, j’ai publié 4 recueils: 

Brumes et chemins     (A.C.M. Editions)
Il fera bientôt noire nuit  (Editions La Bartavelle)
Dedans le ventre doux d’un souvenir de femme  (auto-édition)
Guetteur de lisières: du fugace à l’éphémère  (auto-édition)

Saulnes

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Le temps des cerises

Le silence. Mais à mieux écouter, mais à m’arrêter un instant, j’entends la lente toccata des gouttes d’eau qui se lâchent du plafond de béton fissuré du PC des fondeurs. A droite, des armoires vestiaires rouillées, renversées sur le sol jonché de débris de toutes sortes, des chaussures de sécurité abandonnées sans leurs lacets sur un tas de gravats. A gauche, l’enfilade des douches, avec des conduites d’eau qui pendent entre les briques des cloisons défoncées et se détachent sur le carrelage encore bien blanc fiché d’un porte-savon au dessus des bacs à douche remplis de débris de vitres. Et là, devant, par la fenêtre dégarnie, la silhouette trapue et fantomatique de la centrale qui trône dans la lumière crue du matin…
Je replie mon décamètre, repose mon carnet de croquis sur une tablette de téléphone rouillée et je regarde les buissons aux jeunes feuilles s’agiter devant la porte béante qui offre au regard le massif maintenant boisé des hauts-fourneaux. Le temps semble se figer, et j’entends, comme si le vent tiède l’amenait des Cités Michel dont les fenêtres plongent sur la vieille usine (1), ce vieil air que fredonnaient le René, le Gégène «  Le temps des cerises ».
L’émotion qui monte, c’est un frisson de bonheur, loin de toute nostalgie. Pourtant, je les revois ces hommes qui prenaient leur douche après la tournée, je les revois, la « gueule au feu », je les entends crier sur le chantier de coulée et fredonner à la pause, dans la rue, ces mêmes airs qui circulaient à « la filoche » ; et, de fil en aiguille, laissant filer mes pensées, je rejoins la joie de mes rêves, je sens toute la vigueur de la vie, car dans l’inspiration inépuisable de la mémoire, je vais quelque part et je les emmène dans les projets qui naissent, parfois un peu fous, dans une incessante quête de bonheur. Sans tout ce qu’ils m’ont transmis, et qu’ils continuent à m’inspirer, je n’irais nulle part.
A quoi donc pourrait bien servir de transmettre
la Mémoire, de créer et faire vivre des ateliers d’écriture en évoquant un passé qui redevient alors présent dans nos pensées avec des accents parfois douloureux, des plaies mal cicatrisées, et de le partager si les rêves, si les projets, si les « grands moments » n’étaient pas au bout de ce fil mystérieux de l’histoire ? Ce fil, on le tire un jour, lorsqu’on a déjà « fait de la route » et il n’en finit pas de se dérouler pour nous permettre de tisser le possible de chaque jour nouveau avec les valeurs qui nous animent et dont nous n’avons parfois même plus conscience.
A revenir aussi dans ces pages sur la tragédie de la « Grande Guerre », il faut bien considérer que même si les valeurs alors partagées du patriotisme ont été récupérées à des fins inavouables, -les mêmes qui justifient les guerres d’aujourd’hui-, ces valeurs vécues authentiquement et transmises par nombre de soldats ont sans doute permis, plus de trente ans après, que la seconde guerre mondiale ne fasse pas sombrer l’occident dans la barbarie.
Si l’on regarde aujourd’hui le panorama navrant de toute une palette de hauts responsables convertis à l’idolâtrie du profit financier pour lequel tous les coups sont permis, et qui emmènent leur société vers une faillite humaine sans précédent à l’échelle planétaire, véritable insulte aux valeurs profondes de notre histoire, du pays de l’humanisme et des droits de l’Homme, on comprend que, plus que jamais, la transmission de
la Mémoire ouvrière constitue une piste de salut, un véhicule de l’étincelle qui pourrait modifier encore une fois un cours défavorable de l’Histoire.
Car c’est
la Mémoire de celles et ceux qui constituent la véritable richesse de leur temps, qui la produisent sous toutes ses formes en  poursuivant leur combat pour le progrès de ce monde que j’appelle quelquefois le monde « œuvrier », c’est-à-dire celui qui est à l’œuvre chaque jour et qui se bat pour le rester, refusant que l’Homme, force vive de l’entreprise ne soit déchu pour être désormais présenté, dans cette logique idolâtre du profit, comme un poids pour l’entreprise.
Alors, il pourra bien revenir au service de l’avenir, le «temps des cerises ». 

(1) Il s’agit du site des anciens  hauts-fourneaux d’Hussigny, près de Longwy, en cours de « retraitement » 

EDITO (paru en 2008 dans la revue de mémoire ouvrière « Au fil du fer » 

Le printemps des poètes 2009 à Metz

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La vieille mine

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Requiem (Sonnet)

L’esprit chaud de la fonte s’est évanoui
Au pied du cirque roux des rochers de la mine
Et pleure désormais jusque sous les racines
Le vieux conte du fer au présent inouï. 

C’est un front de buissons révoltés qui culmine,
Prière sur un val tristement recueilli
Où des gnomes perdus se racontent l’usine
Dans le ventre crevé d’un haut-fourneau transi. 

Héritiers du grand maître en sa forge d’ici,
Voyez le désarroi de ceux qu’on déracine !
Ils vivaient de ses feux, vous leur offrez la nuit ! 

Son œuvre est achevée au seuil d’un champ de ruines
Quand sombre la cité en son cœur refroidi,
Et que ses lendemains s’abîment dans l’ennui. 

« Les feux d’Eden » 

Fermeture des hauts-fourneaux de Saulnes en 1967, premier signe d’une lente agonie du Pays-Haut qui mettra une dizaine d’années à rayer de la carte les vallées parmi les plus lourdes de la planète. 

Main douce et… verte !

J’ai crié à tous les échos,
Combien était douce sa main,
Je l’ai chanté en crescendo,
Je recommencerai demain !

Douce, vivante et caressante,
Comme un baume, elle sait guérir
Cet ennui qui parfois me hante,
Sa main se fait tendre à ravir.

Mais, dès lors que l’hiver s’enfuit,
Que le soleil enfin revient,
Dame nature la séduit
Et bien malin qui la retient.

Il faut la voir en son jardin,
Le geste sûr, la main experte,
Ardente rose et gai lupin
Lui sourient, elle a la main verte.

Ses doigts sont un autre printemps,
Ils sont le soleil et la pluie.
Entre ses mains, en peu de temps,
Un caillou germerait. Mais oui !

Les soins qu’elle porte à ses fleurs
Rendraient jaloux plus d’un amant.
Si elle y trouve son bonheur,
C’est comme la rose : important ! 

Et lorsque la saison finit,
Ses mains, pour moi, se font poème.
Son regard, comme soleil, luit
Et sur sa lèvre, on lit : je t’aime ! 

Pompey 6

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De Senelle à La Chiers

Dirais-je ma douleur en ce printemps d’hiver ?
Battez tocsins ! Hurlez sirènes !
Tes feux sont morts, pauvre Lorraine !
Dirais-je ma douleur, de Senelle à
La Chiers ? 

Ainsi l’âme du fer qui bouillait dans tes veines
Pleure chez-nous ses serviteurs ;
Et c’est sans haine en son malheur
Qu’elle s’en va, bannie, aux rives souterraines. 

Adieu Longwy, adieu chaudes vierges d’Ebène,
Gardiennes des derniers labeurs
Où le geste a les mots du cœur !
L’avenir en ton nom garde
la Souveraine ! 

Dirais-je mes espoirs au milieu du désert ?
Tout est vivant, verte Lorraine !
L’homme debout fondra les chaînes
En reparlant d’Amour, de Senelle à
La Chiers ! 

« Les feux d’Eden » 

Texte écrit lors des grandes grèves qui ont suivi l’annonce du plan acier 

Longwy 3

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Pour ceux

Quand le printemps fleurit les arbres de la ville,
Dans les cours des prisons toujours gris sont les murs
Et le vent, chaque soir, sème les chants obscurs
Des hommes en colère au fond de cet asile. 

Lorsqu’à l’aube l’oiseau nous siffle son refrain,
Dans un lit d’hôpital une femme agonise,
Et malgré la douleur, son âme s’éternise
Au bord de cette rive où s’ancre son chagrin. 

Alors qu’un papillon, dans sa métamorphose,
Réunit dans l’instant la grâce et la beauté,
Un enfant doit subir laideur et cruauté
Sous le corps d’un pervers dans une chambre close. 

À l’heure où le soleil épouse l’océan,
Tout un peuple se lève au son de la torture,
Car au cœur du conflit contre la dictature,
La fleur de l’innocence est couverte de sang. 

Il faut chanter pour eux l’espoir d’une autre vie,
Oublier nos tourments, ne serait-ce qu’un jour ;
Il faut écrire aussi des poèmes d’amour
Et donner à nos mots le poids de leur survie. 

(Extrait du recueil « Rouge et Noir Eden ») 

Obsession

Quand le cri d’un enfant qu’on outrage en silence
Ne couvre pas les pleurs d’une femme qui fuit
L’ombre folle d’un homme ivre de violence,
Je danse avec les mots suspendus dans la nuit. 

Une image, à l’écran, de la misère humaine
Aux quatre coins du monde accompagne, le soir,
Mon repas ; néanmoins mon regard se promène
Au gré des faits divers quotidiens sans rien voir. 

Lorsque la terre tremble à l’autre bout du globe
Ou qu’un volcan s’éveille, où suis-je dans mon cœur
Pour entendre les vers que la musique enrobe,
Point les gémissements des témoins de l’horreur ? 

Et si mon fils, un jour, me confie un problème,
Aurai-je encore un œil, une oreille à donner
Pour l’écouter vraiment, sans penser au poème
Que j’écris dans ma tête au petit déjeuner ? 

Ceux que j’aime ont parfois le sentiment de n’être
À mes côtés que vent, sans projet d’avenir ;
Pourtant je n’aurais plus, sans eux, qu’à disparaître
Dans l’espoir que la mort sache nous réunir. 

(Extrait du recueil « Rouge et Noir Eden »). 

Vieux mur

vieuxmur.jpg

Hors du temps

Hors du temps
comme resurgi d’hier,
un décalage inconnu du vécu
venu de la vie de tous les jours d’antan
où les rouages du temps
se meuvent des éléments eau et vent
ou de la force des vivants.
Comme resurgi d’hier, les jours d’antan
qui se découvrent
aux yeux de la découverte
à l’instant ébouriffant
d’habiller le monde proche
des couleurs qu’on lui voit,
qui s’apprivoisent
de visages identifiant l’autre
puis à l’esquisse d’un sourire
simplement parlant d’un cœur sincère
ouvrent les bras et accueillent,
qui nous disent que la parole est d’or et se donne,
que ce qui est authentique est vrai, se touche du doigt
et le reste n’est qu’apparences,
qui nous confessent
en chevauchées ou au pas
que le meilleur ami de l’homme est le cheval,
l’outil rien sans la main
et qu’elle se tend,
que la terre renferme un trésor
si l’on s’en donne la peine
et que cette peine ne s’épanche d’aucune larme,
qu’elle récompense en bonheur,
que savoir c’est faire
et le savoir-faire un héritage à transmettre
qui fait riche celui qui donne et celui qui reçoit,
que la vie va si on la fait aller,
qu’il faut l’aimer pour ce qu’elle est
et aimer les autres pour ce qu’ils sont,
que hors du temps, les jours d’antan
nous apprennent ce que l’on a peut-être perdu.

Pommes flétries

pommesfltries.jpg

Un amour

Le début d’un amour

Voile de trouble
Trouble-tête
Double-croche
Accroche-coeurs

Un amour

De nécessité des couleurs
Intégrales
Où le relief est dans l’arc-en-ciel
Le trait de formes et de sens
De pleins, de déliés
De partout oxygéné
D’une inspiratrice du grand air
D’atmosphères
De rideaux intimes
D’attentions géantes
De saint Valentin entre les fleurs et les coeurs

Et que plus rien n’existe
Jusqu’au dérisoire qui se meurt
De vols de nuit décollés pour le rêve
De volupté
Et qui se déploie et s’évase
La réalité d’un bonheur

Une promesse

Jamais l’oubli extravagant
Le desséchement de tout

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