RESSENTIMENT
Sois rage, Ô ma douceur, et tiens-toi moins tranquille.
Tu réclamais l’espoir ; il t’attend ; le voici :
Un climat dangereux enveloppe la ville,
Les uns sortant la paix, les autres le souci.
Pendant que la lueur des cocktails d’or s’effile,
Sous le feu du courroux, ce moteur sans merci,
Va cueillir le débat qui là-haut se profile.
Ma douceur, donne-moi la main : viens par ici,
Près d’eux. Vois s’avancer les foules indignées,
Sur les ponts, les balcons, colombes alignées,
Surgir le privilège aboli souriant ;
Le réveil horizon venir du fond d’une arche
Et comme un long cortège allant vers l’orient,
Entends, ma chère, entends, la révolte qui marche.
Recueillement
Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici,
Loin d’eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées ;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;
Le Soleil moribond s’endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l’Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.