La musaraigne chantait gaiement
Heureuse de passer calmement
Les beaux jours de l’été à muser
A rêvasser et à s’amuser.
La souris sa voisine, était plutôt austère ;
Il faut, disait elle, garder les pattes sur terre.
Du matin jusqu’au soir, elle allait et venait.
Elle creusait, fouillait, s’affairait, se démenait
Pour tapisser son nid avec des plumes d’oies
Volées dans un bel édredon comme il se doit.
Dessous l’escalier elle avait aménagé
Son garde-manger ; bref, tout le confort ménager.
Il y avait des noix rangées près de son nid
Et des grains de maïs sur un papier jauni.
Notre riche souris, de faim ne mourait point,
Et cela se voyait rien qu’à son embonpoint.
Mais un souci retors la rongeait jour et nuit.
Toujours prête à bondir elle gardait son huis,
De peur qu’un voleur autant fieffé que sournois
Ne vint lui dérober quelque cerneau de noix.
Elle avait tant et plus mais elle était radine
Et vivait chichement de toutes ses rapines.
Elle n’en avait jamais assez, l’avare, jamais ;
Alors dans la cuisine elle visitait la maie,
Rapportant moult pain dans son étroit repaire
Où il advint parfois qu’une noix se fît la paire.
Elle vit un beau matin un morceau de fromage
Et courut sans détour lui rendre son hommage.
Elle eut tort, la goulue, d’être allée y toucher
Car…..CLAC ! la souricière n’en fit qu’une bouchée.
La musaraigne, pendant ce temps,
Vivait de vers et de l’air du temps…
Mieux vaut prendre le temps de vivre et de rêver
Qu’être esclave de ses biens et riche à en crever.