Sous les figuiers faiseurs de rêves
et la mollesse des abandons serviles
le vieil Anglais qui fut mangeur d’opium
étalait l’offrande de ses grêles os
au brasier de Midi-purificateur
Les paupières pellucides en persiennes
le regard arrimé aux rives d’un lointain azur
et tout à la songerie des temps fameux
où les zéphyrs enfantaient la douceur de vivre
dans les palmes d’un empire tropical
Sous les figuiers porteurs de fruits amers
coule une fontaine de thé vert
La servante au galbe chantourné
libre chevelure et capiteuses effluves
chantonne la mélodie lascive
des natives d’amours enamourées
Le gravier grafigne dans les allées
et le jardinier parfume de roses pâles
les fées ailées qui murmurent dans l’air
une prosodie pour les hôtes du paradis
Sous les figuiers faiseurs de rêves
les heures se consument comme le tabac
et la mémoire s’invente une ancienne vie
peuplée d’oiseaux moqueurs et de singes rieurs
de soies flamboyantes comme les coulis de soleil
sur l’ambre des paysannes en libation
et le cuir mouvant des pachydermes
peuplée de palais marmoréens et de sucre d’orge
où des courtisanes mangeuses de pierres précieuses
éventent la paresse des princes en pagne
Sous les figuiers infusent les jours dénudés
jusqu’à la chair suffocante de l’été défaillant
au pied d’un océan de langueur
Le vieil Anglais – qui avait appris le français
sans accent au cœur de l’antique Albion -
pensait à haute voix aux jardins
de Bangalore et de Pondichéry
où la volupté naissait sur un lit de fleurs
et où la mort ne pouvait se concevoir
que dans le sourire d’un dieu dansant
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