De t’aimer, je n’ai plus le cœur
cité de ma jeunesse grise ;
de mille oiseaux chanteurs éprise
au soleil fondant des fondeurs
Le temps gorgé du sang des heures heureuses poursuit son blanc chemin anesthésique.
Les chatons pendouillent comme les regrets qui jamais n’ont enfanté la résurrection de l’humble gaité d’hier. Est-ce trop demander que de ne plus entendre, sur le clavier muet des absences, la voix graveleuse et cruelle du souvenir qui submerge la grève des vaines attentes ?
Visages aimés, visages de toujours, au front de la paroi rocheuse où vient mourir la déferlante des jours, enfants de la curie des innommables qui ont fui les éclats du bonheur ;
visages du don de soi baignés par le travail d’une mer de métal, d’une mer nourricière à ses marées de hautes et basses règles, et tout à la grammaire du faire dans le communautaire de l’esprit,
je vous invoque de toute puissance des émois !
Mais ce regard aimant n’est amarré qu’aux rives blanches et glacées des justes quartiers de l’heure nouvelle née, et déjà tombée dans la suite amnésique des nombres ;
regard mouillé de toutes les pluies versées les nuits d’orage quand les peines font craquer le ciel à l’horizon d’un courage anémié…
Dans cet outre monde, dans ce monde de jadis, les êtres avaient une face familière ; les choses également. Même le temps fané était doux dans son amas de feuilles mortes…
De t’aimer, je n’ai plus le cœur
cité de ma jeunesse grise ;
de mille oiseaux chanteurs éprise
au soleil fondant des fondeurs
Ouais, j’aime encore autant que le texte précédent….
Dernière publication sur Photos, Reportages, Chansons, Venise : RÉTROSPECTIVE DE MES « FOTO » DE L’ANNÉE 2024
Merci Claudio de m’avoir indiqué cette parution et ce commentaire car je ne fréquente plus les blogs depuis un moment faute de disponibilités pour m’engager dans des commentaires qui ne manqueraient probablement pas de me donner envie. A l’occasion de l’évaluation du dernier concours, cet auteur fut pour moi une découverte de poids. Moins par les sujets qu’il traite ici, et qui me sont familiers, que par sa façon d’écrire. C’est du « lourd » comme dirait un copain éditeur. Tout dans la structure des phrases comme dans le vocabulaire très riche et parfaitement adapté à l’image qui émane de sa sensation est soigneusement ordonné sans aucun artifice. C’est rare. En poésie classique ou néo classique dont je suis portant adepte, on dispose de mains courantes, de « modes d’emploi », de points de repères en tous cas. Ici, rien d’autre que l’expression brute des sensations qui montent, qu’il faut déjà capter, reconnaître, structurer. Du grand art.
« Au soleil fondant des fondeurs ». Magique. Qui a pu assister au début d’une coulée au haut-fourneau y reconnaîtra justement la magie, et seulement en cinq mots ». C’est tellement juste !
Je dirai encore que je suis heureux de voir le grand prix attribué cette année, et peut-être pour le première fois (les anciens en SPAF pourront le confirmer ou l’infirmer) à une poésie dite « libre ». Libre ? Qui s’y trompera ? La liberté n’est pas l’anarchie ou le défoulement des sensations ! Bravo Jacques !
Je partage tout à fait ton point de vue, Gérard. Trop souvent en lisant de la poésie libre, j’ai une impression de « mauvais classique ». Ici, la poésie est belle, puissante et structurée. Comme tu le dis si bien : du grand art ! Et la preuve aussi – contrairement à ce que j’entends souvent – qu’on peut devenir Grand Prix des Poètes Lorrains en pratiquant la poésie libre. En fait, classique ou libre, on s’en moque ; l’important est que le poème touche le coeur du lecteur.
Mon Dieu, Zaz, combien de fois en avons nous déjà parlé ? Mon Dieu combien de fois avons nous espéré enfin revenir à une définition de la poésie qui soit menée par l’exemple et non point les théories, et encore moins les politiques de chapelles. Eh bien oui, on peut maintenant, au delà du « dire », l’incarner par ce grand prix. La poésie, classique ou libre, on s’en moque ! La poésie, elle, elle va comme le fleuve, elle nous emmène sur son cours pourvu qu’on accepte de laisser sur la rive nos a priori et nos raideurs pour goûter le charme du voyage.
j’aime beaucoup aussi c’est très parlant et très poignant
des phrases en effet poétiques et riches de sens
amicalement
katyL
Voilà un texte qui nous berce en coulée continue au charme
incandescent et mérite le Grand Prix des Poètes Lorrains.
Superbe !!!
Nous sommes tous donc d’accord….
je dirais même qu’il faut encore plus de talent pour écrire en libre qu’en classique…. car en classique nous sommes quand-même aidés par les règles de l’art qui nous empêchent d’être trop mauvais….. Certains les prennent pour une contrainte, moi je les prends comme une aide….
Mais apparemment le Muller n’a pas besoin de ces béquilles, encore bravo….
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Ce Grand Prix des Poètes Lorrains, qui ne correspond pas exactement aux « canons » des Grands Prix précédemment attribués par la SPAF Lorraine, va faire couler de… l’encre et nous attirer bien des commentaires.
Le jury le savait, en optant pour ce texte fort, qui sort de notre ordinaire.
J’espère que vous viendrez nombreux à la remise des prix (vous suivez mon regard ?) qui vous permettra de faire connaissance avec « le Muller » (comme dit Claudio), et de découvrir un peu plus sa prose poétique, puisque chacun des présents recevra un exemplaire du recueil que la SPAF a le plaisir d’éditer et d’offrir au lauréat, comme chaque année.
Rappel : c’est le dimanche 6 octobre à Maxéville, à 10 h 15, et nous passons toute la journée ensemble, pour goûter le plaisir de nous revoir et de découvrir la poésie de chacun. Coût du repas et des locations : 25 € par personne (voir talon d’inscription).
Bravo à Jacques Muller et aux autres lauréats ! Suspense pour l’Alérion qui sera révélé à midi tapante…