« Aux larmes retenues dans le choc du silence »
Gérard,
Aurais-tu la même opinion que moi à propos de ces règles des « E muet » interdits dans un vers lorsqu’ils apparaissent après une voyelle et ne sont pas immédiatement suivis d’une autre voyelle ? Tels que « jolie » « vie » etc. et comme tous les adjectifs ou épithètes au féminin ou mieux encore, comme « retenues », au féminin pluriel, qui eux sont complètement bannis à l’intérieur d’un vers….
Pouvons nous dire que ces règles sont obsolètes, s’en affranchir et dire encore, comme je l’espère, que nous écrivons toujours en prosodie classique mais en utilisant et prononçant le français d’aujourd’hui et non celui de nos aïeux ?, sans que l’on nous mette dans un sac fourre-tout sur lequel il est inscrit « néoclassiques » ?…
Je reviens seulement au blog où je vois que les inter actions ont repris depuis un petit moment.
Claudio, tu as toujours des questions pertinentes qui provoquent le plaisir d’y répondre dans la mesure où elles sont attachées à une authentique curiosité de fond, et j’y réponds d’autant plus volontiers.
Il ne m’appartient pas de juger de ce qui est ou deviendra obsolète. Seuls nos successeurs en décideront par l’usage, mais je rejoins ton analyse sur la réalité phonétique de la poésie qui traduit justement l’usage d’une langue encore vivante, Dieu merci ! Et je me suis déjà exprimé en ce sens sur le blog à la suite d’une de tes réflexions en la matière. La poésie c’est un chant, et la forme est au service du fond et non l’inverse.
Il y a deux regards possibles qui ne sont pas antinomiques.
Le premier, qui considère la tradition, à un moment donné de l’histoire et qui la respecte comme une référence ex abrupto. Alors on pourrait comparer la poésie dite classique écrite avec un respect absolu des règles de prosodie intangibles comme une sorte « d’appellation contrôlée »
A un débutant, comme aux personnes qui veulent présenter leurs textes à des concours sous une forme classique, je conseillerais de se plier au départ aux règles que tu cites, et qui demeurent écrites, pour acquérir une certaine maîtrise de l’expression. En effet elles diminuent justement le nombre de combinaisons possibles dans l’expression et obligent ainsi à une discipline qui demeurera ensuite dans l’écriture poétique. Personnellement, j’ai à tenir compte du respect de ces règles en tant que membre de jury, et je ne m’en départis pas dans mon écriture, sauf lorsque cela s’impose avec raison, du moins mes raisons.
Le deuxième regard oblige ensuite à entrer dans l’intelligence de la gestion du langage poétique, et c’est une autre affaire, car les voies ne sont pas toutes tracées.
Pour revenir à l’exemple que tu prends, je pouvais employer le mot pleurs pour respecter la règle, en écrivant « De mes pleurs retenus ». Mais cela ne correspondait pas à ma sensation de ce soir là, où j’assistais aux dernières coulées dans une ambiance très particulière, où les larmes coulaient avec une certaine douceur, venant du plus profond et s’écoulant presque naturellement, débordant des yeux. Pleurs avec le son r introduit une sensation plus dure, et le mot entier une évocation plus bruyante incompatibles avec le choc du silence. Aussi la forme achevée du poème est bien celle qui est publiée.
Personnellement, et je rejoins ici ton analyse, je trouve effectivement les règles restrictives que tu rappelles aujourd’hui sans conséquence sur la dynamique poétique, donc sans grande raison de subsister encore très longtemps, sauf en exercice de style. Car si la poésie est bien avant tout un chant, alors la sensation poétique naît à partir d’une lecture phonétique, prononcée ou mentale, et non d’un regard d’analyse cursive comme cela se pratique en grammaire. Autrement, on tombe dans le domaine du conventionnel.
Si quelqu’un pouvait me donner la justification poétique du maintien de ces règles particulières, je serais particulièrement intéressé.
Le domaine des diérèses est également délicat. Certaines sont tolérées, d’autres obligatoires, d’autres enfin proscrites sans que la lisibilité fonctionnelle soit pourtant établie.
Si tu prends l’acrostiche sur deux rimes « Locomotives à vapeur » qui vient d’être publié, tu verras que je fais la diérèse sur chaudière (leur froi-de chau-di-ère au vers 5 alors que la première version comportait « leur glacia-le chau-dière »
Mais ça ne m’allait pas. La chaudière, c’est toute la longueur d’une loco, elle s’allonge dans la perspective des carcasses du cimetière. J’ai donc préféré traîner sur le mot, ce qui ne me serait pas venu à l’idée, deux vers plus loin, avec le mot lumière.
Pour conclure, à celle, à celui qui a le feu de l’expression poétique, je n’aurais vraiment pas de conseil à donner, sauf de ne jamais trahir l’esprit de la poésie « de la musique avant toute chose » (même si on ne préfère pas l’impair), et le reste est littérature.
Quant aux appellations, classique, néo classique, je reste perplexe. Le préfixe néo s’applique soit à une réalité qui retourne aux sources de l’Antiquité, et on peut évidemment citer Racine et Corneille comme exemples significatifs, et on s’apparente alors à un genre, soit à une modernité, et dans ce cas, le préfixe « néo » n’a qu’une existence temporaire, le temps d’une évolution dans l’usage. J’écris donc généralement en forme classique en me permettant certaines licences là où je sens qu’elles ont un sens
La guerre des « anciens » et des « modernes », n’a donc aucune raison d’avoir lieu.
Je suis tout fait d’accord avec toi, Gérard. Chacun doit laisser
libre cours à sa musique intérieure qu’elle soit dans les règles
ou pas, mais toujours avec élégance.
Encore une fois, merci Gérard pour cette magnifique réponse argumentée….Et bravo pour cette formule, que je qualifierai de citation :
« La poésie est un chant, et la forme est au service du fonds et non l’inverse. » C’est mon credo et cette citation serait à inscrire au fronton de portails de poésie…..
Je souscris également à ton premier regard sur la poésie classique vue comme une tradition, une appellation contrôlée, un exercice de style où l’on se doit d’apprendre à faire ses gammes…. Sans vouloir généraliser, nombreux poètes « libérés » devraient déjà s’y essayer avant de nous proposer des textes qui n’ont pour tout rapport avec la poésie que la mise en page….
Mais je souscris plus encore à ton second regard : « entrer dans l’intelligence de la gestion du langage poétique » et tu rajoutes : « car les voies ne sont pas toutes tracées. » Fort heureusement !
Je comprends tout à fait tes explications sur la remarque que j’avais relevée…. Je l’avoue, c’était une analyse « cursive » comme tu dis si bien, (que je ne répéterais pas, je le jure), mais je voulais un tant soit peu provoquer pour t’entendre dire tout ce que tu viens d’énoncer dans cette réponse et qui me conforte dans mes convictions, à savoir :
« Je trouve effectivement les règles restrictives que tu rappelles aujourd’hui sans conséquence sur la dynamique poétique, donc sans grande raison de subsister encore très longtemps, sauf en exercice de style. »
Et surtout : « la sensation poétique naît à partir d’une lecture phonétique, prononcée ou mentale »
C’est aussi pour cela par exemple que je ne consulterai JAMAIS le tableau des diérèses que je trouve accablant. C’est à l’auteur de faire entendre le mot qu’il écrit comme il souhaite le chanter…. J’ai lu « Locomotives à vapeur » et quand je lis, même mentalement, je suis le rythme du poème, j’essaie le l’écouter…. Je suis tombé en arrêt sur ce vers, car j’ai lu de prime abord chau/dière et le rythme s’est rompu…. J’ai fait un petit « retour arrière » et naturellement alors j’ai relu chau/di/ère…. Cela ne m’a posé aucun problème, j’avais mal écouté la chanson…. Et je ne me permettrais jamais une réflexion sur une diérèse ou une synérèse dans un texte sauf si l’auteur prétend écrire en « classiqueux » le plus pur…Si toi, tu l’avais récité ce « Locomotives à vapeur », cela serait passé inaperçu…. En revanche, je l’avoue à ma courte honte, j’avais bien vu la musique sur deux rimes mais je n’avais pas vu du tout l’Acrostiche !…. Désolé…. Une petite mise en page avec la première lettre en gras, ce qui n’est pas ostentatoire, m’aurait ouvert les yeux…. Pourtant ce vers esseulé m’avait quelque peu intrigué :
« Ah les moments heureux flottant sur leur chemin ! »
Mais je n’ai pas percuté !
Pour en terminer, de « concert » avec toi je pose à la ronde cette même question :
« Si quelqu’un pouvait me donner la justification poétique du maintien de ces règles particulières, je serais particulièrement intéressé. »
Si j’osais je préciserais même « la justification poétique et phonétique »….
Comme je ne suis pas régulièrement le blog, je n’ai pas vu ton commentaire, Claudio, te je m’en excuse car il est d’une belle consistance. Merci pour ces réflexions en rebonds.
Mon épouse et compagne m’a mu ce soir une citation qui tombe tout à fait à point (auteur déclaré « Bashö », probablement hindou « Ne marche pas dans la trace des anciens. Cherche ce qu’ils cherchaient » C’est très porteur au niveau de le dynamique de ce qu’on nomme parfois trop vite « évolution ».
Ta « courte honte » au niveau du repérage de l’acrostiche « Locomotives à vapeur » me fait sourire, d’un sourire complice entre auteur et lecteur, car la forme d’une poésie, point n’est besoin d’y mettre un nom de forme a priori, car c’est à l’auteur de décider de cette forme qui correspond à ce qu’il souhaite communiquer, et au lecteur, lui, profiter de ses effets. Ca n’est pas plus compliqué et tu me fais prendre conscience de l’inutilité d’annoncer la forme d’une poésie dans un recueil, dans une sorte de mouvement ostentatoire. C’est en fait enlever un peu de liberté au lecteur si je déclare « Sonnet » ou « rondeau » ou pantoum, ou « acrostiche »… ou si je mets des signes comme le caractère gras en début de vers qui est caractéristique des acrostiches, le faire entrer de force dans un couloir de forme. S’il est connaisseur, il le verra. S’il ne l’est pas, il lui restera l’essentiel si le poème le mérite : un moment privilégié avec le beau où la forme est au service du fond. C’est en tous cas un point important dans ma conception de la poésie.
Pour terminer sur le choix des diérèses, c’est vrai que ma première écriture dans « locomotives à vapeur » se tenait à la pure forme classique avec « glaciale chaudière »
Faut-il être raisonnable pour choisir de faire un « accroc » dans le tapis de la forme quand on a une solution viable qui ne trahit pas la sensation, mais pas forcément la musique qui va avec la vision ? Sans doute que non. Mais je n’en sais pas plus, sinon que dans la vie, dans les activités qui mettent en éveil notre intériorité, nous sommes toujours en marche sur le fil de l’épée, en équilibre entre des pôles d’attraction différents. Mais heureusement, on l’oublie en chantant tout en se pliant à ce subtil exercice.
Alors, Claudio, chante !
Superbe poème où se révèle l’incendescente magie des Hauts Fourneaux et cette splendeur est sertie dans la gravité de ses travailleurs de l’extrême.
« Aux larmes retenues dans le choc du silence »
Gérard,
Aurais-tu la même opinion que moi à propos de ces règles des « E muet » interdits dans un vers lorsqu’ils apparaissent après une voyelle et ne sont pas immédiatement suivis d’une autre voyelle ? Tels que « jolie » « vie » etc. et comme tous les adjectifs ou épithètes au féminin ou mieux encore, comme « retenues », au féminin pluriel, qui eux sont complètement bannis à l’intérieur d’un vers….
Pouvons nous dire que ces règles sont obsolètes, s’en affranchir et dire encore, comme je l’espère, que nous écrivons toujours en prosodie classique mais en utilisant et prononçant le français d’aujourd’hui et non celui de nos aïeux ?, sans que l’on nous mette dans un sac fourre-tout sur lequel il est inscrit « néoclassiques » ?…
Je reviens seulement au blog où je vois que les inter actions ont repris depuis un petit moment.
Claudio, tu as toujours des questions pertinentes qui provoquent le plaisir d’y répondre dans la mesure où elles sont attachées à une authentique curiosité de fond, et j’y réponds d’autant plus volontiers.
Il ne m’appartient pas de juger de ce qui est ou deviendra obsolète. Seuls nos successeurs en décideront par l’usage, mais je rejoins ton analyse sur la réalité phonétique de la poésie qui traduit justement l’usage d’une langue encore vivante, Dieu merci ! Et je me suis déjà exprimé en ce sens sur le blog à la suite d’une de tes réflexions en la matière. La poésie c’est un chant, et la forme est au service du fond et non l’inverse.
Il y a deux regards possibles qui ne sont pas antinomiques.
Le premier, qui considère la tradition, à un moment donné de l’histoire et qui la respecte comme une référence ex abrupto. Alors on pourrait comparer la poésie dite classique écrite avec un respect absolu des règles de prosodie intangibles comme une sorte « d’appellation contrôlée »
A un débutant, comme aux personnes qui veulent présenter leurs textes à des concours sous une forme classique, je conseillerais de se plier au départ aux règles que tu cites, et qui demeurent écrites, pour acquérir une certaine maîtrise de l’expression. En effet elles diminuent justement le nombre de combinaisons possibles dans l’expression et obligent ainsi à une discipline qui demeurera ensuite dans l’écriture poétique. Personnellement, j’ai à tenir compte du respect de ces règles en tant que membre de jury, et je ne m’en départis pas dans mon écriture, sauf lorsque cela s’impose avec raison, du moins mes raisons.
Le deuxième regard oblige ensuite à entrer dans l’intelligence de la gestion du langage poétique, et c’est une autre affaire, car les voies ne sont pas toutes tracées.
Pour revenir à l’exemple que tu prends, je pouvais employer le mot pleurs pour respecter la règle, en écrivant « De mes pleurs retenus ». Mais cela ne correspondait pas à ma sensation de ce soir là, où j’assistais aux dernières coulées dans une ambiance très particulière, où les larmes coulaient avec une certaine douceur, venant du plus profond et s’écoulant presque naturellement, débordant des yeux. Pleurs avec le son r introduit une sensation plus dure, et le mot entier une évocation plus bruyante incompatibles avec le choc du silence. Aussi la forme achevée du poème est bien celle qui est publiée.
Personnellement, et je rejoins ici ton analyse, je trouve effectivement les règles restrictives que tu rappelles aujourd’hui sans conséquence sur la dynamique poétique, donc sans grande raison de subsister encore très longtemps, sauf en exercice de style. Car si la poésie est bien avant tout un chant, alors la sensation poétique naît à partir d’une lecture phonétique, prononcée ou mentale, et non d’un regard d’analyse cursive comme cela se pratique en grammaire. Autrement, on tombe dans le domaine du conventionnel.
Si quelqu’un pouvait me donner la justification poétique du maintien de ces règles particulières, je serais particulièrement intéressé.
Le domaine des diérèses est également délicat. Certaines sont tolérées, d’autres obligatoires, d’autres enfin proscrites sans que la lisibilité fonctionnelle soit pourtant établie.
Si tu prends l’acrostiche sur deux rimes « Locomotives à vapeur » qui vient d’être publié, tu verras que je fais la diérèse sur chaudière (leur froi-de chau-di-ère au vers 5 alors que la première version comportait « leur glacia-le chau-dière »
Mais ça ne m’allait pas. La chaudière, c’est toute la longueur d’une loco, elle s’allonge dans la perspective des carcasses du cimetière. J’ai donc préféré traîner sur le mot, ce qui ne me serait pas venu à l’idée, deux vers plus loin, avec le mot lumière.
Pour conclure, à celle, à celui qui a le feu de l’expression poétique, je n’aurais vraiment pas de conseil à donner, sauf de ne jamais trahir l’esprit de la poésie « de la musique avant toute chose » (même si on ne préfère pas l’impair), et le reste est littérature.
Quant aux appellations, classique, néo classique, je reste perplexe. Le préfixe néo s’applique soit à une réalité qui retourne aux sources de l’Antiquité, et on peut évidemment citer Racine et Corneille comme exemples significatifs, et on s’apparente alors à un genre, soit à une modernité, et dans ce cas, le préfixe « néo » n’a qu’une existence temporaire, le temps d’une évolution dans l’usage. J’écris donc généralement en forme classique en me permettant certaines licences là où je sens qu’elles ont un sens
La guerre des « anciens » et des « modernes », n’a donc aucune raison d’avoir lieu.
Je suis tout fait d’accord avec toi, Gérard. Chacun doit laisser
libre cours à sa musique intérieure qu’elle soit dans les règles
ou pas, mais toujours avec élégance.
Encore une fois, merci Gérard pour cette magnifique réponse argumentée….Et bravo pour cette formule, que je qualifierai de citation :
« La poésie est un chant, et la forme est au service du fonds et non l’inverse. » C’est mon credo et cette citation serait à inscrire au fronton de portails de poésie…..
Je souscris également à ton premier regard sur la poésie classique vue comme une tradition, une appellation contrôlée, un exercice de style où l’on se doit d’apprendre à faire ses gammes…. Sans vouloir généraliser, nombreux poètes « libérés » devraient déjà s’y essayer avant de nous proposer des textes qui n’ont pour tout rapport avec la poésie que la mise en page….
Mais je souscris plus encore à ton second regard : « entrer dans l’intelligence de la gestion du langage poétique » et tu rajoutes : « car les voies ne sont pas toutes tracées. » Fort heureusement !
Je comprends tout à fait tes explications sur la remarque que j’avais relevée…. Je l’avoue, c’était une analyse « cursive » comme tu dis si bien, (que je ne répéterais pas, je le jure), mais je voulais un tant soit peu provoquer pour t’entendre dire tout ce que tu viens d’énoncer dans cette réponse et qui me conforte dans mes convictions, à savoir :
« Je trouve effectivement les règles restrictives que tu rappelles aujourd’hui sans conséquence sur la dynamique poétique, donc sans grande raison de subsister encore très longtemps, sauf en exercice de style. »
Et surtout : « la sensation poétique naît à partir d’une lecture phonétique, prononcée ou mentale »
C’est aussi pour cela par exemple que je ne consulterai JAMAIS le tableau des diérèses que je trouve accablant. C’est à l’auteur de faire entendre le mot qu’il écrit comme il souhaite le chanter…. J’ai lu « Locomotives à vapeur » et quand je lis, même mentalement, je suis le rythme du poème, j’essaie le l’écouter…. Je suis tombé en arrêt sur ce vers, car j’ai lu de prime abord chau/dière et le rythme s’est rompu…. J’ai fait un petit « retour arrière » et naturellement alors j’ai relu chau/di/ère…. Cela ne m’a posé aucun problème, j’avais mal écouté la chanson…. Et je ne me permettrais jamais une réflexion sur une diérèse ou une synérèse dans un texte sauf si l’auteur prétend écrire en « classiqueux » le plus pur…Si toi, tu l’avais récité ce « Locomotives à vapeur », cela serait passé inaperçu…. En revanche, je l’avoue à ma courte honte, j’avais bien vu la musique sur deux rimes mais je n’avais pas vu du tout l’Acrostiche !…. Désolé…. Une petite mise en page avec la première lettre en gras, ce qui n’est pas ostentatoire, m’aurait ouvert les yeux…. Pourtant ce vers esseulé m’avait quelque peu intrigué :
« Ah les moments heureux flottant sur leur chemin ! »
Mais je n’ai pas percuté !
Pour en terminer, de « concert » avec toi je pose à la ronde cette même question :
« Si quelqu’un pouvait me donner la justification poétique du maintien de ces règles particulières, je serais particulièrement intéressé. »
Si j’osais je préciserais même « la justification poétique et phonétique »….
Comme je ne suis pas régulièrement le blog, je n’ai pas vu ton commentaire, Claudio, te je m’en excuse car il est d’une belle consistance. Merci pour ces réflexions en rebonds.
Mon épouse et compagne m’a mu ce soir une citation qui tombe tout à fait à point (auteur déclaré « Bashö », probablement hindou « Ne marche pas dans la trace des anciens. Cherche ce qu’ils cherchaient » C’est très porteur au niveau de le dynamique de ce qu’on nomme parfois trop vite « évolution ».
Ta « courte honte » au niveau du repérage de l’acrostiche « Locomotives à vapeur » me fait sourire, d’un sourire complice entre auteur et lecteur, car la forme d’une poésie, point n’est besoin d’y mettre un nom de forme a priori, car c’est à l’auteur de décider de cette forme qui correspond à ce qu’il souhaite communiquer, et au lecteur, lui, profiter de ses effets. Ca n’est pas plus compliqué et tu me fais prendre conscience de l’inutilité d’annoncer la forme d’une poésie dans un recueil, dans une sorte de mouvement ostentatoire. C’est en fait enlever un peu de liberté au lecteur si je déclare « Sonnet » ou « rondeau » ou pantoum, ou « acrostiche »… ou si je mets des signes comme le caractère gras en début de vers qui est caractéristique des acrostiches, le faire entrer de force dans un couloir de forme. S’il est connaisseur, il le verra. S’il ne l’est pas, il lui restera l’essentiel si le poème le mérite : un moment privilégié avec le beau où la forme est au service du fond. C’est en tous cas un point important dans ma conception de la poésie.
Pour terminer sur le choix des diérèses, c’est vrai que ma première écriture dans « locomotives à vapeur » se tenait à la pure forme classique avec « glaciale chaudière »
Faut-il être raisonnable pour choisir de faire un « accroc » dans le tapis de la forme quand on a une solution viable qui ne trahit pas la sensation, mais pas forcément la musique qui va avec la vision ? Sans doute que non. Mais je n’en sais pas plus, sinon que dans la vie, dans les activités qui mettent en éveil notre intériorité, nous sommes toujours en marche sur le fil de l’épée, en équilibre entre des pôles d’attraction différents. Mais heureusement, on l’oublie en chantant tout en se pliant à ce subtil exercice.
Alors, Claudio, chante !