Je n’ai pas déserté le blog, mais avec octobre, la pression sur différents axes est repartie, et les réflexions qui sont nées entre nous cet été, et surtout les réactions qu’elles suscitent, même si elles demeurent encore au niveau d’un petit nombre, permettent de voir un petit bout de chemin parcouru dans la direction de ce que je pense que la plupart d’entre nous souhaitent. Un blog vivant, engagé dans une véritable recherche des voies sincères d’une poésie qui ne sacrifie pas le fond à la forme mais respecte en même temps l’enseignement de la forme comme un enseignement magistral dans lequel l’élève peut et souvent doit, en fonction de ses dons propres, dépasser le maître.
Je suis à peine parvenu au terme des commentaires sur le texte de Joëlle, « Lorraine blanche » que je m’aperçois du nombre de ceux qui concernent maintenant « brouillard givrant ».
Je m’arrête pour aujourd’hui à la somme des premiers pour en tirer quelques enseignements, et surtout des pistes de travail.
Je retiens le commentaire de Joëlle (commentaire 16 du 4 octobre) qui fait écho à un projet dont j’avais déjà dit quelques mots à Isabelle pour critiquer l’un de mes propres textes. C’est pour un peu plus tard à propos d’un thème sur les fameuses poésies que l’on dit « libres ».
Pour l’heure, et pour ma part je jouerai le jeu en soumettant, à l’inverse de ce qui se fait naturellement, des poèmes que je n’ai pas retenus, des poèmes inachevés, (mais que j’achèverai peut-être un jour s’il me vient non point une possible correction, elle serait peut-être là, mais la pièce manquante du puzzle).
J’appuie donc la proposition de Joëlle, et on y va !
Pour les exploitations, chacun sa sensibilité bien entendu, et si par exemple Joëlle aide les personnes en leur proposant des solutions techniques, je suis pour ma part incapable de le faire même si la plume me démange, étant plus particulièrement attiré par une pédagogie générale dans laquelle l’auteur va trouver sa réponse à partir de questionnements, d’exemples, d’échanges, de réflexions.
Et les deux attitudes sont parfaitement complémentaires, car toutes les personnes n’ont pas les mêmes besoins pour avancer. Et combine y a-t-il de sensibilités complémentaires ? Nous sommes riches et l’ignorons trop souvent. Je pense par exemple à Claudio avec son développement sur l’évolution phonétique de la langue et de ses inévitables répercussions sur les règles de prosodie. Nous en reparlerons à partir d’exemples de poésies.
Ah qu’il est difficile de ne pas confondre progrès et modernité ! L’un qui fait avancer dans la logique de vie de l’adaptation, l’autre qui aveugle et occulte l’avenir dans une sensation de suffisance !
Cultivons nos jardins, échangeons nos fruits et nos expériences.
Pour ma part, j’élude déjà la réalité de la prosodie en tant que telle. Si on ne veut pas se plier à son école, alors on écrit en prose, et la prose poétique n’a rien de à envier en son genre à la poésie. Il faut choisir, et demeurer cohérent avec son choix.
Il ne suffit pas d’aller à la ligne tous les trois mots pour construire un poème.
Si en revanche, on choisit l’école formatrice de la prosodie, la respecter n’est pas non plus en faire son maître, mais son outil.
J’oserai parler de « l’âme » d’une poésie, qui échappe à toute analyse discursive. Changez un mot, fut-il meilleur au niveau de la prosodie, et l’or peut du coup se changer en plomb. Et c’est l’une des raisons qui me rend prudent quant aux possibilités de correction. Alors il faut un dialogue de fond entre auteur et lecteur. Et c’est une question d’affinités et de capacité de liberté intérieure, car s’il manque l’un, on risque de manquer tout.
J’ai pourtant connu une exception dans une amitié exceptionnelle, avec un ami malheureusement disparu tragiquement dans les quelques années qui nous ont séparé de nos grands prix respectifs des poètes lorrains. Nous avions vingt ans. Je lui avais « filé » le virus de la poésie et lui du dessin et de la peinture. Et nous pouvions échanger des heures et des heures à bâtons rompus sur le contenu de nos poèmes jusqu’à presque nous retrouver dans la pensée profonde qui animait le texte de l’autre. Je n’ai jamais connu depuis une telle expérience, et c’est pourquoi je peux mesurer l’écart entre les échanges au niveau des réflexions, qui sont à notre portée et qui font vraiment progresser, et la possibilité d’entrer vraiment dans l’élan poétique profond de l’autre. Cela, c’est vraiment à chacun de le sentir.
Nous sommes dans un art qui demande beaucoup, avec un chemin au bord duquel nous ne pouvons jamais nous asseoir trop longtemps, juste le temps d’une satisfaction passagère, éphémère. Et pourtant, dans notre vie intérieure, il peut nous porter si loin, si loin !
Voilà l’essentiel de ce que j’ai pu ressentir à travers les échanges assez nombreux de ces derniers temps, et j’avais envie de ne pas encore reléguer « aux archives » tout un potentiel de vie qui semble prometteur.
Pour l’exploitation de cette richesse, nous avons déjà de la matière, une proposition de Joëlle qui peut faire son chemin et ensuite…on verra.
Bien à chacune et chacun en poésie
GD