Il faudrait être peintre

Il faudrait être peintre, afin que le crayon
            Distille un flot de teintes sur les haies en haillons,
Qu’en flaques flamboyantes s’éclaboussent les mots
            Où s’effilochent, mauves, les fumées du hameau. 

Les feuilles taciturnes, sur les talus en deuil,
            Gribouillent de taches fauves un larmoyant recueil,
Tandis que les sapins, en vertes majuscules,
            Brandissent leur chagrin dans le soir qui bascule. 

Il faudrait un pinceau pour délayer le bleu
            Malade du brouillard et de ses gris poisseux
Et qu’un souffle malmène quelques feuilles en sursis,
Dernières gouttes d’or sur des traînées de nuit. 

Les chemins de grès rose referment leurs ornières
            Et les buissons ardents effacent leurs crinières.
On ne distingue plus, dans tout le noir qui coule,
            Qu’un soubresaut de flamme où le vallon s’écroule. 

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